Les anthocyanes : des pigments naturels aux vertus thérapeutiques

Les anthocyanes (du grec ancien : ànthos « fleur » et kùanos  « bleu sombre ») sont des pigments végétaux appartenant à la famille des composés phénoliques et plus précisément aux polyphénols, un groupe de substances réputées pour leurs propriétés antioxydantes puissantes. Ils sont responsables des teintes allant du rouge au bleu dans de nombreux fruits, légumes et fleurs. Près de 800 molécules différentes d’anthocyanes sont recensées. Leur synthèse, qui peut s'effectuer dans tous les organes des plantes, est souvent déclenchée par divers stress environnementaux ou liée au développement, à la reproduction. Les fonctions sont multiples : modulation de la photosynthèse, défense contre les pathogènes, communication avec les pollinisateurs, régulation thermique ou encore protection des cellules face aux radicaux libres. En plus de neutraliser ces derniers grâce à leur puissant effet antioxydant, les anthocyanes atténuent les dommages oxydatifs liés à une exposition excessive à la lumière en interceptant les photons lumineux (effet filtre solaire).

Ils existent sous deux formes : anthocyanosides et anthocyanidols. Les anthocyanosides sont des composés dans lesquels une molécule d’anthocyanidol est liée à un sucre. Cette forme permet de faire circuler les anthocyanidols dans la plante.

Leurs bienfaits en phytothérapie

Dans ce domaine, les anthocyanes occupent une place essentielle. Puissants antioxydants, ils neutralisent les radicaux libres – ces molécules instables responsables du vieillissement cellulaire et des dommages sur l'ADN –. Ils aident à préserver l'intégrité des cellules et à prévenir l'apparition de nombreuses pathologies. Ils participent à la lutte contre les maladies neurodégénératives et cardiovasculaires.

Ces molécules favorisent une meilleure circulation sanguine en diminuant la perméabilité des capillaires sanguins et en améliorant leur élasticité. Cela en fait des alliées pour la santé cardiovasculaire, mais aussi pour la santé oculaire ! Elles renforcent les capillaires rétiniens et aident à réduire la fatigue visuelle, tout en ralentissant la progression de troubles comme la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA).

Les anthocyanes présentent également des effets anti-inflammatoires importants, en particulier dans la gestion des inflammations chroniques.

Enfin, ces composés équilibrent les niveaux de glucose et de lipides, ce qui les rend précieux dans la régulation des troubles métaboliques​.

Dans quels aliments les trouver ?

Ces pigments naturels apportent des couleurs vibrantes allant du rouge au bleu. Ces teintes dans les fleurs, les fruits, les légumes sont souvent des indicatrices de leur présence.

Voici quelques-unes des meilleures sources d’anthocyanes dans l'alimentation :

• Fruits rouges : Les classiques fraises, cerises, framboises, mûres et groseilles sont particulièrement prisés pour leurs bienfaits sur la santé cardiovasculaire et leur richesse en vitamine C.
• Baies sauvages : Les myrtilles, cassis, airelles et baies de sureau sont réputées pour leur capacité à améliorer la mémoire et la santé oculaire, en plus de leur action antioxydante.
• Légumes colorés : Les choux rouges, les aubergines, les betteraves et certains types de maïs offrent aussi de nombreux avantages, notamment en termes de soutien à la santé digestive et cardiovasculaire.
• Fleurs comestibles : Violettes, bleuets, coquelicots, hibiscus, leurs fleurs fraîches ou sèches sont idéales pour décorer des plats et des salades, ajoutant une touche élégante au repas.
  
  

Un fait intéressant : les six anthocyanidols les plus courants sont même utilisés comme colorants alimentaires dans l’industrie. Le code additif E163 a été attribué à ces pigments ajoutés à divers produits alimentaires transformés. Ainsi, ils sont repérables dans l’étiquetage des listes d’ingrédients !

Dans quelles plantes médicinales les trouver ?

Ces composés présents naturellement dans des baies, des feuilles ou des fleurs offrent des propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et protectrices.

La myrtille (Vaccinium myrtillus) est bien plus qu'un simple fruit délicieux !  Les anthocyanes représenteraient environ 0,5% du fruit frais. Traditionnellement elle est utilisée pour soulager les symptômes de fragilité capillaire et les douleurs associées aux jambes lourdes dues aux troubles circulatoires veineux mineurs. Sous forme séchée, elle peut également être employée pour traiter les diarrhées légères grâce à ses propriétés astringentes, et soulager les symptômes hémorroïdaires. Ses effets vasculoprotecteurs sont particulièrement remarquables : elle améliorerait la circulation sanguine, réduirait la perméabilité des capillaires et soutiendrait la santé cardiovasculaire en inhibant l'agrégation plaquettaire et l'oxydation du cholestérol LDL. De plus, elle serait bénéfique pour les personnes souffrant de troubles métaboliques tels que l'hypertension ou le diabète, en régulant la glycémie et en réduisant l'inflammation. Les bienfaits de la myrtille ne s'arrêtent pas là : elle protègerait la peau des dommages causés par les rayons UV et soutiendrait la santé osseuse. Elle présenterait un potentiel neuroprotecteur, notamment en améliorant la mémoire et les fonctions cognitives, en particulier chez les personnes âgées. Enfin, ses propriétés antibactériennes contre Escherichia coli en font une alliée précieuse pour la prévention des infections urinaires.

Pour préserver la santé oculaire, l'extrait de baie de myrtille peut être combiné avec ceux de l'euphraise (Euphrasia officinalis) et de ginkgo (Ginkgo biloba). Il est recommandé de prendre, pendant trois semaines, 5 gouttes de chaque extrait dans un peu d'eau, matin et soir, en dehors des repas. Après une pause de sept jours, il est possible de renouveler si nécessaire.


Myrtillier (Vaccinium myrtillus)

Les baies de sureau noir (Sambucus nigra) sont reconnues pour leurs vertus, notamment pour renforcer le système immunitaire, lutter contre les infections virales et réduire l'inflammation. Elles sont particulièrement riches en anthocyanes, qui leur confèrent des propriétés antioxydantes notables ainsi que leur couleur pourpre. Elles sont fréquemment utilisées pour traiter les infections respiratoires comme les rhumes et les grippes, que ce soit en prévention ou pour accompagner les symptômes en cours. Elles sont également efficaces contre les autres inflammations des voies respiratoires, comme celles d’origine allergique, notamment en cas de mucosités excessives. De plus, elles sont utiles pour soulager la toux mixte ou productive. Les baies de sureau sont aussi particulièrement bénéfiques en cas de diarrhée d'origine infectieuse, grâce à leurs propriétés antivirales et anti-inflammatoires. Par ailleurs, elles sont également utiles en cas de constipation légère, en favorisant un transit intestinal plus fluide grâce à leurs effets adoucissants sur le système digestif.

Pour soulager une diarrhée d'origine infectieuse, utiliser des extraits hydro-alcooliques de baies de sureau, de noyer (Juglans regia) et de cyprès (Cupressus sempervirens). Prendre 15 gouttes de chaque, matin et soir, dans un peu d'eau, pendant sept à dix jours. Ce mélange permet de renforcer les défenses naturelles de l'organisme, de lutter contre l'infection et de calmer les symptômes diarrhéiques.


Sureau noir (Sambucus nigra)

Les feuilles du Cassisier (Ribes nigrum) renferment des oligomères proanthocyanidiques (OPC), des pigments complexes qui contiennent des unités d'anthocyanes dans leur structure. Ce sont des polyphénols de la famille des tanins. Ils sont réputés pour leurs effets anti-inflammatoires et anti-œdémateux. Les feuilles de cassis sont traditionnellement utilisées pour leurs propriétés diurétiques, ce qui est particulièrement intéressant en cas de rétention ou de douleurs articulaires. Elles accompagnent les inflammations locales de la bouche et de la gorge, grâce à leur effet astringent.

Les fruits, quant à eux, sont riches en vitamine C, en sucres naturels et en anthocyanes. Ce sont eux qui donnent cette couleur sombre. Ils apportent des propriétés antioxydantes notables, soutenant la santé vasculaire et renforçant les défenses immunitaires. Ils présentent également des effets antidiarrhéiques et antispasmodiques. De plus, ces fruits peuvent être utilisés pour soulager les douleurs articulaires, grâce à leurs vertus anti-inflammatoires.

Pour un bon confort articulaire, associer les extraits hydroalcooliques de baies de cassis, de feuilles de cassis et d’ortie (Urtica dioica). Pendant trois semaines, prendre 15 gouttes de chaque dans un peu d'eau, matin et soir, en dehors des repas. Après une pause de sept jours, renouveler si nécessaire.


Cassissier (Ribes nigrum)

A l’automne les feuilles de vigne rouge (Vitis vinifera) rougissent : c’est là qu’elles sont le plus riches en anthocyanes. Elles le sont également en oligomères proanthocyanidiques (OPC).

Leur usage est bien établi dans l’accompagnement de l’insuffisance veineuse chronique et des troubles associés, tels que jambes lourdes, enflées, douleurs, tensions et démangeaisons. Les propriétés veinotoniques et angioprotectrices de la vigne rouge aident à améliorer la circulation sanguine.

Elle s'avère également efficace dans le traitement des troubles de la microcirculation et de la fragilité capillaire, tels que ecchymoses, pétéchies et télangiectasies (petites varices superficielles). De plus, ses propriétés anti-oedémateuses et antioxydantes réduisent l'enflure et protègent les cellules des effets des radicaux libres.

Cette plante est particulièrement bénéfique pour les personnes souffrant de troubles circulatoires veineux mineurs, de fragilité capillaire, ou encore de symptômes liés aux hémorroïdes.

Pour améliorer l’aspect de la peau en cas de présence de pétéchies sur le visage, l'extrait de feuilles de vigne rouge peut être associé à ceux du petit houx (Ruscus aculeatus) et du marronnier d'Inde (Aesculus hippocastanum). Cette combinaison permet d'améliorer la circulation sanguine, de diminuer la perméabilité des capillaires, d’augmenter leur résistance et de prévenir leur détérioration.

Il est recommandé de prendre, pendant trois semaines, 15 gouttes de chaque extrait dans un peu d’eau, deux fois par jour, en dehors des repas. Après une pause de 7 jours, il est possible de renouveler si besoin.


Vigne rouge (Vitis vinifera)

Les anthocyanes, avec leur large éventail de couleurs et de propriétés, offrent des bénéfices considérables pour la santé. Présents dans de nombreux végétaux, ils sont réputés pour leurs bienfaits sur la circulation sanguine, la santé oculaire, la réduction de l'inflammation, ainsi que pour leur rôle dans la lutte contre le vieillissement cellulaire. L’intégration d’aliments riches en anthocyanes dans notre assiette pourrait donc améliorer notre bien-être général. En parallèle des anthocyanes, les bétalaïnes forment un autre groupe de pigments rouges ! Leur présence est limitée à certains champignons et à un petit groupe de plantes à fleurs, les Caryophyllales. Ces molécules se déclinent en deux gammes de teintes : rouge-violacé et jaune, avec des exemples comme les bougainvillées, les belles-de-nuit, ou encore les racines de la betterave rouge. Bien que moins étudiées, les bétalaïnes semblent jouer un rôle protecteur face aux stress environnementaux de manière similaire aux anthocyanes, avec un très fort pouvoir antioxydant.

Il est essentiel de ne jamais modifier un traitement en cours sans l'avis d'un médecin ou d'un pharmacien. Avant d'utiliser des plantes médicinales, demandez toujours l'avis d'un professionnel de santé, en particulier si vous souffrez de pathologies préexistantes.

Claire Mison, praticienne en herboristerie traditionnelle, créatrice d’expériences végétales, formatrice et animatrice en phytothérapie, botanique et plantes sauvages comestibles.